Pourquoi la communication sur la santé est importante en santé publique
On janvier 13, 2022 by adminRajiv N Rimal a & Maria K Lapinski b
a. Département de la santé, du comportement et de la société, Université Johns Hopkins, Baltimore, MD, États-Unis d’Amérique (USA).
b. Département de la communication, Université d’État du Michigan, East Lansing, MI, États-Unis d’Amérique.
Correspondance avec Rajiv N Rimal (e-mail : ).
Bulletin de l’Organisation mondiale de la santé 2009;87:247-247. doi : 10.2471/BLT.08.056713
Pour la première fois, la communication en matière de santé s’est vu attribuer un chapitre dans les objectifs Healthy People 2010 des États-Unis d’Amérique (USA), illustrant ainsi son importance croissante, selon Parrott1. Dans ces objectifs, fixés par le ministère américain de la santé et des services sociaux, la communication en matière de santé est considérée comme pertinente pour pratiquement tous les aspects de la santé et du bien-être, notamment la prévention des maladies, la promotion de la santé et la qualité de vie. Cette augmentation de la proéminence du domaine, à l’extérieur, se produit en même temps que d’importants développements internes, dont l’un est l’accent mis sur l’étude des influences environnementales, sociales et psychologiques sur le comportement et la santé. Face aux défis mondiaux posés par les grandes menaces, les chercheurs et les praticiens de la communication en matière de santé reconnaissent l’importance de la prévention et, avec elle, la nécessité de comprendre le comportement humain à travers le prisme de la théorie. Cela a donné lieu à une théorisation du rôle des perceptions du risque,2,3 des normes sociales,4,5 des émotions6,7 et de l’incertitude8 dans les comportements de santé.
La communication est au cœur de ce que nous sommes en tant qu’êtres humains. Elle est notre façon d’échanger des informations ; elle signifie également notre capacité symbolique. Ces deux fonctions reflètent ce que James Carey a caractérisé comme étant les vues de transmission et de rituel de la communication, respectivement.9 Carey a reconnu que la communication sert un rôle instrumental (par exemple, elle aide à acquérir des connaissances), mais elle remplit également une fonction rituelle, qui reflète les humains en tant que membres d’une communauté sociale. Ainsi, la communication peut être définie comme l’échange symbolique d’un sens partagé, et tous les actes communicatifs ont à la fois une composante de transmission et une composante rituelle.
Les efforts d’intervention visant à modifier les comportements sont des actes communicatifs. En se concentrant principalement sur la fonction de transmission de l’échange d’informations, ces efforts négligent souvent les processus rituels qui sont automatiquement engagés par la communication. En adoptant le point de vue de la transmission de la communication, il est raisonnable de réfléchir soigneusement aux canaux par lesquels les messages d’intervention sont diffusés, à qui le message est attribué, à la façon dont les membres de l’auditoire réagissent et aux caractéristiques des messages qui ont le plus d’impact. Ces considérations reflètent les composantes essentielles du processus de communication : canal, source, récepteur et message, respectivement. Dans la vision rituelle, cependant, les publics cibles sont conceptualisés comme des membres de réseaux sociaux qui interagissent les uns avec les autres, s’engagent dans des cérémonies sociales et tirent un sens de la mise en œuvre de comportements habituels.
Trois considérations d’intervention importantes émergent de cette double vision de la communication. La première est la réalisation que les interventions de communication ne tombent pas dans un vide social. Au contraire, l’information est reçue et traitée à travers des prismes individuels et sociaux qui déterminent non seulement ce que les gens rencontrent (par des processus d’exposition sélective), mais aussi le sens qu’ils tirent de la communication (connu sous le nom de perception sélective), selon des facteurs à la fois au niveau individuel (expérience antérieure, croyances d’efficacité, connaissances, etc.) et macrosocial (relations interpersonnelles, modèles culturels, normes sociales).
Deuxièmement, il est raisonnable de s’attendre à des divergences entre les messages diffusés et reçus. Elles surviennent non seulement en raison d’une exposition différentielle à l’intervention mais aussi en raison des différences d’interprétation dans le décodage de l’information. Une étude minutieuse de la correspondance entre les messages tels qu’ils sont envoyés et reçus est donc d’une grande importance pour éviter les effets non intentionnels (et pire, contre-productifs).10
Troisièmement, la communication est un processus dynamique dans lequel les sources et les récepteurs d’informations échangent continuellement leurs rôles. L’un des principes centraux des interventions de communication en matière de santé – la nécessité de procéder à une évaluation formative approfondie, à une évaluation des besoins de l’auditoire et à un prétest des messages – découle directement de cette compréhension.
L’utilisation de ces principes de communication en matière de santé dans le domaine de la santé publique présente des défis. Tout d’abord, l’évaluation des interventions de communication, en particulier celles qui utilisent les médias de masse nationaux (par exemple, la radio), ne se prête généralement pas à des essais randomisés. Par conséquent, des techniques méthodologiques et statistiques innovantes sont nécessaires pour attribuer les résultats observés aux efforts d’intervention. La nature réactive et transactionnelle des interventions de communication en matière de santé signifie également que le contenu des interventions peut être modifié, ce qui ajoute un défi supplémentaire au processus d’évaluation. Deuxièmement, le fait que les spécialistes du comportement reconnaissent que les causes du comportement humain se situent à de multiples niveaux qui se renforcent mutuellement pose des difficultés pour concevoir et tester des interventions à plusieurs niveaux. Cette complexité des déterminants du comportement en matière de santé exige également une approche multidisciplinaire pour promouvoir efficacement le changement, ce qui signifie en outre que les interventions doivent intégrer des compétences issues de divers milieux professionnels. Enfin, en raison de l’évolution rapide des canaux de communication, les interventions de communication en matière de santé doivent faire des efforts supplémentaires pour rencontrer leurs publics à leur niveau d’utilisation de la technologie.
La communication en matière de santé a beaucoup à célébrer et à contribuer. Le domaine gagne en reconnaissance en partie parce qu’il met l’accent sur la combinaison de la théorie et de la pratique pour comprendre les processus de communication et modifier le comportement humain. Cette approche est pertinente à une époque où de nombreuses menaces pour la santé publique mondiale (à travers les maladies et les calamités environnementales) sont ancrées dans le comportement humain. En réunissant des chercheurs et des praticiens de diverses disciplines et en adoptant des approches théoriques à plusieurs niveaux, les communicateurs de la santé ont une occasion unique de contribuer de manière significative à améliorer et à sauver des vies. Nous sommes optimistes.
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